Communiquer et couderc (Clermont au loin)

À l’origine, servant de lieu de pâturage au centre ou à proximité du village, le couderc était d’usage convenu. D’utilité collective, il appartenait à la communauté villageoise et affirmait spatialement cette vocation par la présence de nombreux édifices tels le four à pain, la croix de mission, la bascule, l’arbre principal ou le monument aux morts, mais aussi par la possibilité d’y voir se dérouler des fêtes et autres rassemblements.

Espace social, le couderc ou couvige est aussi un carrefour particulier de chemins. Ses formes diverses, tantôt aigues, tantôt obtuses, émergent de la rencontre entre des routes noueuses et un relief impor- tant. Par le biais du couderc, le village ou hameau communique par son centre, il n’est ni un square ni un parking mais il est âme de ruralité. Il apparaît par sa belle indéfinition comme la communication entre les villageois, mais aussi entre l’extérieur et l’intérieur, entre l’ouvert et le construit. Interstice villageois, telle une poche pleine de vide ou riche de sens, il représente la vacance, un temps et un espace où l’on ne répond pas obligatoirement aux attentes.

Aujourd’hui, en accueillant des systématismes d’urbanité tels les bordures, les postes techniques, le mobilier d’éclairage ou les modules de jeux d’enfants, les coudercs perdent peu à peu de leur utilité et de leur polyvalence.

Ils disparaissent en raison du stationnement ou de l’élargissement des voies mais aussi de la dispersion des foyers et du report des activités. La culture rurale semble plaider, de manière contradictoire, pour les standards de l’aménagement urbain et à mesure, s’affranchit de sa belle polyvalence. Les bordures délimitent des espaces que rien ne sépare dans l’usage ; les panneaux indiquent ou interdisent, mais n’orientent plus ; le mobilier d’éclairage affiche ses mâts colorés le jour et aveugle la nuit ; les fleurs sont suspendues et survivent par rationnement d’eau.

Pourtant, c’est l’apparente absence de traitement du couderc qui garantit la valorisation du cadre architectural, invite à la rencontre et à la communication villageoise. Le couderc ne pourrait-il être l’espace nécessaire à tout nouvel ensemble habité ?

 

 

édité sous : 

Clermont au loin

Chronique périurbaine

Textes : Pierre et Rémi Janin, Alexis Pernet et Hugo Receveur
Photographies : Christophe Guez

Ouvrage édité par Fûdo Éditions, 2011

Pilotage et commande : Parc naturel régional Livradois-Forez, Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne, le Grand Clermont (2011)