Raccourcir et circuit ( Clermont Au loin)

Il y a là l’idée d’un « à travers champ ». Raccourcir c’est se libérer d’un certain encombrement, d’un poids de l’espace qui nous détournerait de notre intérêt à couper court.

Le paysage est une considération des espaces de vie et donc une prise en compte de pratiques diffuses et actives, la représentation d’un ruissellement usager.

DESIRE PATH : Ce terme inventé par Gaston Bachelard désigne les traces produites par les raccourcis que les gens créent dans l’espace public pour accélérer leur circulation. Cette métaphore est le point de départ d’une réflexion sur la manière dont circulent les flux dans cet espace et notre capacité à se les ré-approprier et à ré-inventer notre relation à la ville.

Ce ruissellement prend corps sous forme de raccourcis inattendus. Des sentes à travers les pelouses ou des clôtures éventrées indiquent la nécessité de recréer des passages humains à travers les pièces urbaines. Ces passa- ges pourraient être qualifiés d’ « améniducs », c’est-à-dire des passages provisoires d’aménité. Ces passages ne sont pas pour autant dénués d’intérêt fonctionnel, simplement cet intérêt ne concerne dans un premier temps qu’un petit nombre de personnes. Formaliser clairement ces passages inciterait certainement d’autres usagers à les emprunter. De la même manière, forma- liser une bande cyclable peut permettre pendant un temps de générer une pratique culturelle, à savoir l’usage du vélo. A maturité, la disparition de cette voie n’engendre pas la disparition de la pratique, celle-ci étant douée d’aménité.

Les raccourcis peuvent être considérés comme des courts-circuits spatiaux. Lorsqu’il nous arrive d’arpenter des espaces pensés selon une logique industrielle et dévolus à la circulation des marchandises, l’envie et la nécessité de « couper court » se font rapidement sentir. Par définition, le court-circuit est une mise en relation de deux points ou de deux espaces de qualité très différente. Raccourcir reviendrait à recoloniser des espaces devenus imperméables par la dissociation systématique des usages.

Comparer la circulation des individus à celle des fluides permet de mieux comprendre ce besoin et cette capacité à retrouver des connexions en des lieux inattendus, bien que cela paraisse de l’ordre de l‘impertinence. L’eau, comme d’autres flux, suit obstinément le relief, soumise au sens gravitaire. Elle érode son propre circuit et cette érosion révèle la nature et les contraintes du substrat. Elle grave et par un effet de négatif, certains éléments (les plus résistants à l’érosion) émergent et peuvent constituer des motifs.

Révélateurs ou indicateurs de l’activité qui les a forgés, les motifs métropolitains clermontois peuvent être le foyer d’un renouvellement paysager, qui ne répondrait pas seulement à des ques- tions de regard mais aussi à des questions d’usage. Les motifs métropolitains sont par exemple le circuit de Charade ou le Puy de Crouel, le premier étant un motif d’urbanité au coeur de la campagne des volcans et le second un motif de ruralité inscrit dans l’urbanité des échangeurs autoroutiers. Le contraste entre ces deux motifs et le milieu d’où ils ont émergé met en exergue le caractère hermétique de l’urbanisme qui leur a donné naissance. La mutation de ce territoire implique de s’approprier ces motifs et de les intégrer au cœur du projet métropolitain, comme des pièces urbaines à désenclaver.

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Clermont au loin